La maison des Soieries Bonnet nait à l’aube du XIXe siècle. Elle est le miroir des mutations de ce siècle en perpétuel mouvement. Ses tissus unis noirs, puis ses étoffes façonnées habillent les puissants et la bourgeoisie qui émerge avec la Révolution industrielle.
Le monde connait alors un bouleversement sans précédent. Jusqu’au milieu du XIXe siècle, les modes successives sont l’apanage des classes privilégiées. Le vêtement est un marqueur de différenciation sociale et professionnelle. Les acteurs en présence sont le fabriquant de tissus, la clientèle et
l’atelier de couture. Cette situation se modifie ensuite avec l’apparition de l’industrie de la confection, les premiers magasins de nouveautés, puis les Grands magasins vantés par Emile Zola.
Jupe à crinoline Denis Durand Couture / 2022 / Taffetas, soie. Fonds documentaire des Musées de l’Ain.
L’essor des classes moyennes, la mécanisation de la soierie lyonnaise et le développement des techniques de teinture favorisent ce nouveau secteur de l’habillement.
Les changements politiques, les progrès économiques, technologiques ou scientifiques influencent la mode qui change rapidement et devient un phénomène international. Paris est consacrée capitale du luxe et de la mode avec l’invention du concept de Haute Couture par Charles Frédéric Worth. C’est aussi le temps des journaux de mode, de la photographie, de la machine à coudre familiale, du développement des transports, des
expositions universelles, véritables vitrines du luxe et des innovations.
La bourgeoisie d’affaires, enrichie par l’industrie, fait étalage de luxe lors de réceptions et de fêtes prestigieuses. Il existe des tenues pour l’après-midi, des toilettes pour un dîner privé, les robes de bal, les robes de théâtre… La mode, très codifiée, et le corset qui contraint le corps, sont le reflet de la place des femmes dans la société, faire-valoir de la réussite de leurs époux.
WORTH, INVENTEUR DE LA HAUTE-COUTURE
Charles Frédérick Worth (1825-1895) est considéré à juste titre
comme l’inventeur de la Haute Couture. Adoubé par l’Impératrice
Eugénie, il fait de Paris la capitale de la couture. Il participe à
la construction de la conception actuelle de l’industrie du luxe
amorçant un mouvement qui fait des tailleurs des créateurs dont
les modèles portent le nom. La Haute Couture naissante ne répond
pas aux demandes des clients comme le faisaient les couturières,
elle anticipe les désirs. Par sa créativité et ses tarifs, elle répond
aux exigences de l’élite friande d’exclusivité.
Worth a un sens aigu des affaires et bénéficie d’une aura d’exclusivité. Il a le don de l’autopromotion et transforme le commerce en art.
Il est le premier créateur de mode à bénéficier d’une aura internationale. Il crée des robes de bal et des tenues
combinant taffetas, velours et soie lyonnaise, sa préférée avec des détails complexes. Il invente les jupes à tournure à devant plat qui remplacent les crinolines à la chute de l’Empire. Il lance la tunique à hauteur du genou, portée sur une longue jupe, les petites crinolines, etc. Il est le premier à présenter sa nouvelle collection une saison à l’avance, à faire porter ses créations à de vraies mannequins et à vendre dans le monde entier des créations exclusives.
Défenseur des droits d’auteur, il participe à la création de la chambre syndicale de la couture parisienne qui existe toujours. A sa mort en 1895, ses fils reprennent la House of Worth. Sa griffe domine les cocktails chics et l’univers des robes de soirée jusqu’aux années 1850. Son influence est déterminante de Poiret à Valentino.
Le manteau de bal, créé pour l’Exposition universelle de 1894
et connu uniquement par cette gravure, ici reproduite, figurant
dans le catalogue de l’Exposition universelle de 1894. Il a été
confectionné avec le tissu aux hirondelles de la maison Bonnet,
présenté et primé à la même Exposition universelle. Son motif
présentant des oiseaux en plein vol sous un angle nouveau
est influencé par la mode du japonisme, depuis la première
participation du Japon à une Exposition universelle en 1867.
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